PYGMALION ET GALATÉE 5
Για τάβλι (1) το (2) ξεκίνησε, ο Θρασύβουλας ψες (3)
βράδι. Αλλά ο Χλέμπουρας (4) είχε μια ρέντα (5) στο
κόκκαλο (6), άλογο πράμα (7), πού να στα λέω (8)!
Το μίλαγε κι ερχότανε (9)! Στις "πόρτες" (10), τον άφησε
με δυο πούλια στο χέρι και το'κλεισε! Στο "πλακωτό" (11), του
στρίμωξε την παραμαμά (12), άσε καλύτερα (13)! Στο "φεύγα"
(14), τρίτη ζαριά (15) και να'σου το εξάπορτο (16)!
Παραλίγο να του το φόραγε κολλάρο (17)! Αλλη μια νύχτα τσάμπα
(18). Ρέστος (19) και πανί με πανί (20), ο Θράσος.
Καλά που'χε και ογδόντα τάλαρα (21) καβάντζα (22), να τη
βγάζει καθαρή (23) στην κενωνία (24), και να'ναι και
ασπροπρόσωπος (25).
Πρωί-πρωί, λοιπόν, αραχτός (26) ο Θρασύβουλας με τ'όνομα, όπως
πάντα σ'εφτά καρέκλες... Και πάνω που (27) του φέρνει το
μαυροζούμι (28) ο μούργος (29), του βάζει τη φωνή (30)
ο Θράσος και του λέει:
- Πάνε (31) μέσα και φέρε, μάνι-μάνι (32), μολύβι και
χαρτί και πιάσε μου (33) κι ένα τσίπουρο (34) μερακλαντάν
(35)και κάνα φυστίκι αράπικο (36). Εχω δουλειά να γράψω!
- Τσίπουρο πρωί-πρωί, κύριε Θράσο, με τον καφέ;
Ε, ρε, ποιος είδε το θεό και δεν τον φοβήθηκε (37)!
- Λογαριασμό θα σου δώσω (38), ρε λεχρίτη (39); Πλερώνω
και λέω (40)! Φέρ'τα όλα, τσάκα-τσάκα (41) και μην
ξαναβγάλεις κιχ (42), να μη στα πω έξω απ'τα δόντια (43)
και ξαναβρεθείς στους πέντε δρόμους (44), να λες το ψωμί ψωμάκι
(45)! Γουστάρω (46) τώρα να τα πιω και περί ορέξεως
κολοκυθόπιτα (47)! Κι αν σου ζητήσω κι άλλο, θα το φέρεις και θα
πεις κι ένα τραγούδι (48)! Αντε, και πάρ'τα πόδια σου (49),
χαραμοφάη (50)!
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(1) Le fameux jeu moyen-oriental, toujours en vogue dans tous les
pays de la Méditerranée Orientale, aussi connu en France sous les noms
de "tables", "jacquet", "tric-trac", "backgammon", etc.
(2) το > article neutre qui peut devenir impersonnel et général
dans le parler populaire: ex.: πού το πας; => où veux-tu en venir? /
αυτή το κάνει κάθε μέρα => elle le fait (=> le sexe, en solo, duo, trio,
etc.) tous les jours, etc.
(3) vieille version et prononciation paysanne et poétique de χτες
=> hier.
(4) surnom argotique très commun pour un mec sale, débraillé,
dégueulasse
(5) frangrec, déformation de "rente" => veine, bol, chance
(6) litt.> os; argot, trad.> dé
(7) άλογο πράμα (rien à voir avec "cheval") => déformation
populaire marrante de "άλλο πράμα" => autre chose, signifiant, par ext.:
"incroyable"
(8) litt.> où que je te les dise; traduction libre > attends que
je te raconte / écoute voir / tu verras, etc.
(9) litt.> le dire/l'annoncer et il/ça arrive; trad.> expression
qui, au jeu, désigne le veinard, où tout vient en sa faveur
(10) litt.> "portes"/"ancres" => une des trois principales
variantes du jeu de "tavli"
(11) litt.> "écrasé"/"emprisonné" => une autre variante où l'on
peut emprisonner un pion de l'adversaire pour qu'il ne puisse pas
avancer sans être libéré.
(12) litt.> coincer l'avant-maman => la nourrice; expl.>
emprisonner le second pion de l'adversaire, le condamnant pratiquement à
une double défaite; il va de soi que si l'on emprisonne le premier pion
qui s'appelle "μάνα" => "maman", c'est gagné d'office, le jeu finit.
(13) litt.> laisse, mieux!; expl.> il vaut mieux laisser tomber /
ne pas insister, etc.
(14) litt.> "va-t-en" => encore une variante du jeu où l'on doit
"partir", "courir", le plus vite possible (les deux autres variantes du
tavli, "guioul" et "moultezim" ne sont pas hellénisées et gardent leurs
noms persans/turcs).
(15) litt.> lancée des dés
(16) litt.> "six-portes" sous entendant "fermées"; expl.> dans
cette variante, si on arrive à aligner 6 de ses pions de suite,
l'adversaire ne peut plus avancer les siens
(17) litt.> pour un peu il le lui porterait (le tavli) en col;
expl.> dans une explosion d'extrême colère, supposant qu'on assène un
coup si fort avec le tavli sur la tête du gars qu'il finit par porter le
tavli comme un col autour du cou.
(18) litt.> encore une nuit gratuite / en vain / à l'oeil
(19) litt.> déformation du français "reste"; trad.> fauché/pauvre/tondu/pelé
(20) litt.> tissu avec tissu; expl.> description d'une poche vide;
trad.> voir (19)
(21) litt.> déformation argotique:> τάλαρο au lieu de τάλιρο,
pièce de monnaie ou billet de 5 (drachmes, euros, etc., devenu aussi
synonyme du nombre 5; la racine se trouve à l'origine de l'allemand/bohémien/tchèque
"Thaler" et de l'américain "dollar"; d'aucuns prétendent que ça provient
du mot homérique: τάλαρος (masc.) ou ταλάρι (neutre) => panier (qui
existe toujours en Epire et à Chypre), mais j'en doute; plusieurs
langues ont des termes argotiques pour designer "5": à part le grec
"τάλιρο", il y a le vieux français "thune" puis "misérable" (parce que
les vieux billets de 5 francs avaient la tête de Victor Hugo, auteur des
"Misérables"), l'espagnol "duro" (=> une pièce de 5 pesetas), l'anglais
"fiver", etc.
(22) litt.> cachette / épargne; peut être de l'italien "gavazza"
(=> endroit où l'on cachait des vivres pour s'en ... "gaver" après) ou
aussi de l'italien "cava" (=> cave, où l'on cache le bon vin) / "cavo"
(=> cap, difficile à circonvenir), d'où le verbe grec marinier
"καβατζάρω".
(23) litt.> la sortir propre; trad.> être propre vis-à-vis de la
loi / se la couler douce
(24) litt.> κενωνία => prononciation argotique au lieu de
κοινωνία (=> société)
(25) litt.> visage blanc; trad.> propre / innocent / immaculé
(26) litt.> étalé / étendu / avachi
(27) litt.> et sur que; trad.> juste au moment de / sur quoi
(28) litt.> jus noir; trad.> café (péjoratif)
(29) litt.> chien de berger / bâtard / commun / sale / clebs;
métaph.> jeune brutal/fruste/goujat/maladroit
(30) litt.> lui met la voix; trad.> l'appelle / lui crie /
l'engueule
(31) litt.> va! (impératif sing. argotique) => apocope du
populaire πάγαινε! et du puriste πήγαινε!
(32) litt.> vite-vite!; trad.> en vitesse! => possible dérivation
du français "se magner" (le cul/la rondelle/le train, etc.)
(33) litt.> attrape-moi! => argot, au lieu de φέρε μου!; trad.>
aboule! apporte-moi! / amène -moi!
(34) litt.> gnôle, typiquement grecque, distillée à partir de
marc de raisin. Se trouve sous plusieurs noms selon la région du pays :
Tsipouro, Raki, Tsikoudia... il s'agit en fait du même marc, bien fort,
sec, de quelques 40 degrés), fabriqué de la même manière. Gaffe! Ne pas
confondre avec "ouzo" ...
(35) litt.> déformation de μερακλής / μερακλίδικος, du turc "merak",
et la terminaison bien argotique ... ντάν => celui qui fait les choses
bien soignées, consciencieusement; trad.> bien soigné / corsé / fignolé
(36) litt.> pistache africaine (noire) / cacahuète / arachide (par
opposition à φυστίκι Αιγίνης => pistache d'Egine)
(37) litt.> qui a vu Dieu et n'en a pas eu peur! => expression
idiomatique signifiant extrême "colère" et "menace".
(38) litt.> des comptes je te donnerai? trad.> j'ai pas de
comptes à te rendre!
(39) litt.> de l'ancien grec: minable/vaurien/nul/sale/va-nu-pied
(insulte bien grave)
(40) litt.> je paie et je dis; (vieille expression argotique du "milieu");
expl.> puisque je paie, j'ordonne à ma guise.
(41) litt.> voir synonyme (32)
(42) litt.> onomatopée de quelque son similaire => trad.> piper
mot / dire ouf
(43) litt.> te dire tout dehors des dents; trad.> te dire sans
ménagement / te dire tes 4 vérités (=> très intéressant l'anglais "tell
some home truths" et l'espagnol "cantar las cuarenta")
(44) litt.> dans les 5 rues; trad.> dans la pauvreté / sans abri
/ sans toit / clochard
(45) litt.> appeler le pain-petit pain; expl.> être dans
l'extrême pauvreté où même le pain est un luxe (comparer la boutade de
Marie Antoinette sur la "brioche" en 1789)
(46) litt.> je veux / j'aime / j'ai envie de; dérivé des termes
des langues néo-latines "gosto"/"gusto"/"goût", qui donna aussi "γούστο"
(dégénéré aussi en "blague", "c'est marrant", etc.)
(47) litt.> question goût? tarte de courgettes; probable
déformation marrante de l'expression latine "de gustibus et coloribus,
non disputandum" qui, étant compliquée, fut traduite dérisoirement en
argot.
(48) litt.> et tu diras (chanteras) une chanson!; expl.> te
plaise ou pas, tu feras ce qu'on te dit!
(49) litt.> prends tes pieds! voir synonyme (32)
(50) litt.> du turc/arabe الحرام
"al haram" => chose sacrée, honte, pêché, désigne aussi le
fainéant/paresseux qui vit/s'alimente aux dépens des autres